“La Voie Mokudo : Héritage, Transmission et Dynamique Vivante”

 

En hommage à la dynamique vivante de Mokudo

 

Chers membres et pratiquants de l’Association Bouddhiste Zen Mokudo,

 

Permettez-moi de vous partager un texte qui apparaît aujourd’hui comme un pilier, non seulement pour honorer ce qui a été vécu, mais surtout pour tracer une direction vers les années à venir. Écoutez ces mots avec un cœur ouvert, non pas pour juger ou interpréter, mais pour recevoir ce qui, peut-être, résonnera avec ce qui vous pousse à vous lever chaque matin, à pratiquer, à vivre au monde le plus paisiblement possible.

 

Il ne s’agit pas ici de rédiger un texte pour honorer une personne dans une perspective de culte ou de mise en lumière d’une individualité. Mais l’humanité étant ce qu’elle est, remercier devrait devenir à nouveau un acte naturel et essentiel. Remercier celles et ceux qui, par leurs énergies, leurs engagements, leurs hésitations même, ont permis d’être ici, dans un lieu accueillant, chauffé, ouvert. À tous, merci.

 

Cependant, ce qui a été insufflé dans cette association ne se résume pas à la somme de ses membres. Ce qui vit ici dépasse les individus et pointe vers un souffle plus large, une conviction partagée, une direction enracinée dans le cœur du Dharma. Et pour cela, je souhaite rendre hommage au Révérend Taïun, aussi nommé le Bodhidharma d’Alsace, fondateur de cette association, dont la vision et l’engagement continuent de nourrir cette communauté vivante.

 

Il ne s’agit pas de regarder l’homme ou le passé, mais de reconnaître ce souffle initial, cette flamme qui, telle une bougie, peut se transmettre et s’étendre si les mèches se laissent embraser. Ce souffle a donné naissance à la Voie Mokudo, la Voie du Silence, et il continue de la faire vivre à travers chacun d’entre nous.

 

Le chemin de Mokudo

 

Le 18 décembre 2008, l’association est née avec une intention claire : offrir un cadre pour la pratique de la méditation assise, zazen, et l’étude du Zen dans la lignée de Dōgen et de Bodhidharma. Ce fut un premier pas, sincère et humble, vers une Voie qui allait évoluer au fil des années.

 

La Voie Mokudo trouve son inspiration dans le Mokushoka de Maître Wanshi. Ce silence qu’elle porte n’est pas une absence, mais une présence infinie. C’est un silence qui demande une écoute profonde, une écoute qui ne cherche ni à répondre ni à maîtriser, mais simplement à accueillir ce qui est.

 

Pourtant, comme toute graine, le chemin était incertain. Peu de personnes soutenaient l’aventure, et l’association entra rapidement en sommeil. Mais la graine n’était pas morte. Le Révérend Taïun, dans un acte de foi silencieuse, a maintenu la pratique, même dans ce que l’on pourrait qualifier de solitude.

 

En 2012, cette graine s’est réveillée. Une volonté nouvelle a émergé : structurer cette pratique sur des bases solides, avec le soutien de nouveaux membres fondateurs. L’association a alors pris racine à Pulversheim, offrant un espace dédié à la méditation et à la pratique du Zen.

 

En 2017, la communauté a grandi. Les murs de Pulversheim devenant trop étroits, l’association a déménagé à Cernay. Ce changement n’était pas qu’une question de lieu ; il marquait une maturation, une volonté d’offrir un cadre plus respectueux de la pratique et une invitation à toute personne cherchant à s’asseoir dans la simplicité de zazen.

 

Puis vint 2020, une année de crise sanitaire qui aurait pu affaiblir l’association. Mais au lieu de cela, elle a renforcé son besoin de se réinventer. Mokudo a trouvé à Soultz un lieu qui reflète son essence : un espace indépendant, ouvert, ancré dans la vie quotidienne de ses membres.

 

L’emblème de Mokudo

 

L’emblème de notre association porte également cette richesse symbolique. Inspiré du Avataṃsaka Sūtra (Sūtra de l’Ornementation fleurie), il illustre les cinq sphères formant un mandala en fleurs, représentant différentes dimensions du Dharma :

• La sphère de la Loi conditionnée.

• La sphère de la Loi inconditionnée.

• La sphère de la Loi à la fois conditionnée et inconditionnée.

• La sphère de la Loi ni conditionnée ni inconditionnée.

• La sphère de la Loi sans obstacle.

 

Ces sphères reflètent la nature interdépendante et dynamique de toutes choses, une vérité fondamentale du Mahayana. Au centre, les deux fleurs d’Udumbara incarnent la relation unique entre maître et disciple, une transmission vivante et rare qui nourrit notre pratique.

 

Une transmission vivante

 

Le Sūtra de l’Entrée à Lankā (Lankāvatāra Sūtra) occupe une place fondamentale dans la dynamique vivante de la transmission chez Mokudo, car il invite à dépasser les illusions créées par l’esprit discursif pour toucher directement la réalité au-delà des concepts. Ce texte profond, souvent associé aux enseignements de Bodhidharma, met l’accent sur l’expérience directe de la véritable nature de l’esprit, une approche qui résonne profondément avec la Voie Mokudo. La transmission, telle qu’elle est vécue ici, ne repose pas sur la répétition de dogmes ou sur une autorité extérieure, mais sur un éveil progressif à cette sagesse innée, qui se manifeste par la pratique sincère et le silence. Le Lankāvatāra Sūtra rappelle que la véritable compréhension ne peut être transmise par des mots, mais qu’elle se révèle dans l’intimité de la pratique et dans la relation vivante entre maître et disciple. 

 

À Mokudo, ce texte inspire une approche organique et dynamique de la transmission : un partage d’expérience qui se transforme et s’actualise sans cesse, tout en restant ancré dans l’essence du Dharma.

 

Ainsi, cette Voie Mokudo n’est pas qu’un lieu physique ou une tradition héritée. Elle est une invitation à vivre une transformation intérieure, à se laisser toucher par le silence et à marcher sur cette Voie avec sincérité. 

 

J’aimerais partager ma gratitude envers le Révérend Taïun, non seulement pour avoir fondé cette association, mais pour avoir incarné une conviction et des valeurs qui continuent de résonner aujourd’hui. À travers son engagement, il a ouvert un chemin qui permet à chacun de se rencontrer, non pas pour lui ou pour un autre, mais pour ce qu’il y a de plus vrai en soi.

 

Quant à moi, ce n’est pas seulement un homme que j’ai rencontré, mais une flamme vivante, une conviction partagée, qui me permettent encore aujourd’hui de pratiquer en veillant à maintenir cette sincérité.  

 

À celui qui souhaite s’engager, sachez qu’il n’y a jamais eu de porte : vous êtes toujours les bienvenus. À celui qui souhaite partir, sachez qu’il n’y a jamais eu de porte : ce départ est aussi une part de votre pratique, et vous êtes également les bienvenus dans ce cheminement. Puissions-nous, à travers nos rencontres, nos causeries, et nos pratiques silencieuses, poursuivre cette tradition vivante et lumineuse.

 

Avec gratitude et humilité,

Zenki